ASIE/INDE - L'incitation à la haine religieuse alimente la violence au Manipur

jeudi, 6 juillet 2023 violence   minorités religieuses   minorités ethniques  

New Delhi (Agence Fides) - Une intense prière et une vaste campagne de sensibilisation à la situation du Manipur, un état du nord-est de l'Inde qui est le théâtre d'affrontements interethniques (voir Fides 9/5/2023 et 9/6/2023), traversent les communautés catholiques de l'Inde. Deux mois après le début des violences, les communautés de croyants ont vécu, le 2 juillet, une journée spéciale de prière pour le peuple souffrant du Manipur.
Le Président de la Conférence des évêques catholiques de l'Inde (CBCI), Mgr Andrews Thazhath, archevêque de Trichur, a exprimé, au nom de l'Église indienne, son profond regret que "la violence et l'instabilité sans précédent aient dominé la région ces derniers jours", tandis que "les actes de violence et les incendies criminels se poursuivent sans relâche, en particulier dans les zones périphériques de la région". Des maisons et des villages ont été incendiés, les pillages et les vols se poursuivent, des lieux de culte ont été profanés et incendiés, et plus de 100 personnes ont trouvé la mort.
"Plus de 50 000 personnes sont déplacées, sans abri et souffrent dans divers camps de secours et résidences privées. De nombreuses personnes ont fui la capitale Imphal et l'État pour des lieux plus sûrs", note le message des évêques indiens, qui appellent les fidèles à adresser à Dieu des "intentions spéciales pour la paix et l'harmonie" dans les prières des fidèles lors des messes et à organiser une heure d'adoration dans toutes les paroisses afin d'intercéder pour le peuple du Manipur. La Conférence épiscopale invite les communautés à organiser des processions, des veillées de prière et des rassemblements pour la paix en solidarité avec le peuple du Manipur, afin de sensibiliser la population à la situation.
En outre, les associations, les mouvements et les ONG sont encouragés à faire part de leurs préoccupations au gouvernement fédéral. D'autre part, les communautés catholiques du pays sont invitées à "accueillir généreusement" les personnes originaires du Manipur et à mettre en place des structures d'enseignement et d'accueil pour les étudiants migrants, tandis que Caritas Inde a mis en place des réponses et des initiatives de solidarité pour plus de 14 000 personnes déplacées.
"Le père George Mutholil SJ, ancien provincial des jésuites du Kerala et nouvel assistant régional des jésuites pour l'Asie du Sud, s'interroge sur la surdité des institutions face à une violence qui fait rage depuis deux mois et sur le vaste mouvement de la société civile qui diffuse des appels et organise des manifestations dans tout le pays. "Il semble que la surdité soit intentionnelle. Le cri du peuple de Manipur n'est tout simplement pas entendu", tandis que la polarisation et le phénomène du "communalisme" exacerbent les blessures de la société.
Au fil des ans, note le jésuite, en particulier dans le nord de l'Inde, l'incitation à la haine religieuse a envahi les esprits, non seulement pendant les élections, mais aussi par la diffusion de vidéos sur les médias sociaux appelant les hindous à "prendre les armes pour combattre les chrétiens et les musulmans".
"Personne ne semble se préoccuper de ces discours de haine", note le père George Mutholil. L'organisation paramilitaire nationaliste hindoue "Rashtriya Swayamsevak Sangh" (RSS) a affirmé dans un éditorial que "l'effusion de sang au Manipur a été perpétrée avec le soutien de l'Église, qui tente d'attiser la haine religieuse", dénonce le jésuite, affirmant que "la violence au Manipur est le résultat d'années d'incitation à la haine et de politiques qui sèment la discorde".
Il a réaffirmé : "Les réponses inspirées par une authentique charité chrétienne doivent dénoncer les incitations à la haine et les politiques qui sèment la discorde. Les discours de haine présentent les chrétiens et les musulmans comme les principaux ennemis du peuple indien". Dans ce contexte, face à la surdité des gouvernants et à l'impuissance des communautés locales, l'issue est la prière accompagnée de l'action, ce qui signifie "arrêter l'incitation à la haine et dénoncer la politique de division propagée par le parti au pouvoir". Le pape François, a conclu le jésuite, a rappelé : "On ne sort pas seul d'une crise : il faut prendre des risques et donner la main".
(PA) (Agence Fides 6/7/2023)


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