ANALYSE/OMNIS TERRA - Soudan du Sud : vers la paix

samedi, 22 février 2020 paix   réconciliation   politique  

La paix semble à portée de main. Le Soudan du Sud connait une phase cruciale de son histoire. Le chemin est ouvert pour mettre un terme au conflit civil en cours depuis six ans. Le Président Salva Kiir a en effet annoncé une entente avec le responsable des rebelles, Riek Machar, en vue de la formation d’un gouvernement d’unité nationale. La population sud-soudanaise contemple cet accord avec trépidation et dans l’espérance après des années de souffrance.
L’accord de paix qui durait depuis septembre 2018, le plus long de la très brève histoire du Soudan du Sud, était sur le point de finir comme les nombreux autres signés auparavant. Il semblait que s’approchait à nouveau le cauchemar de la guerre civile qui, en moins de sept ans, a fait quelques 350.000 morts, causé l’évacuation et l’expatriation de près de 4 millions de personnes et réduit 7 millions de citoyens dans une situation d’urgence alimentaire. La nation la plus jeune du monde, qui s’est détachée du Soudan seulement en 2011, fait partie de celles qui recourent le plus fréquemment aux enfants soldats – à raison de quelques 20.000 – et elle ne parvient pas à exploiter les énormes potentiels d’une zone riche en ressources.
Le geste éclatant du Pape François qui, en avril 2019, avait invité les responsables politiques et religieux du pays au Vatican, leur baisant les pieds et les implorant de prendre un engagement solennel en faveur de la paix semblait, lui aussi, un lointain souvenir. Puis est arrivée, inattendue, la plus grande surprise. « Le compromis auquel nous sommes parvenus aujourd’hui – a déclaré le Président Kiir le 15 février alors qu’il semblait désormais impossible de parvenir à un accord sur la composition de l’Etat acceptée par le gouvernement et les oppositions – constitue une douloureuse décision, peut-être la plus difficile de ma vie, mais dans le même temps, elle représente un passage nécessaire si nous voulons parvenir à la paix ». C’est en ces termes que Salva Kiir annonçait avoir accepté la demande de réduire à 10 – contre 32 actuellement – le nombre des Etats du Soudan du Sud, mettant fin aux spéculations concernant l’imminente rupture des négociations en vue de la formation du gouvernement d’unité nationale – prévu par le Revitalized Agreement on the Resolution of the Conflict signé en septembre – et le retour immédiat à l’état de guerre. « En avril dernier – a-t-il ensuite ajouté – nous avons été au Vatican en présence des trois responsables religieux mondiaux – le Pape, l’archevêque de Canterbury, primat de la communion anglicane et le modérateur de l’église presbytérienne d’Ecosse NDR. Nous avons prié et le Pape nous a baisé les pieds. Nous ne pouvons pas l’oublier. Cela a été une bénédiction pour notre pays et nous ne pouvons pas ne pas respecter notre promesse en recommençant à nous faire la guerre ».
Se présente désormais le défi de la formation du gouvernement d’unité nationale alors que le responsable de l’opposition armée, Riek Machar – ancien dauphin de Salva Kiir – a fait filtrer son opposition à la création de trois nouvelles zones administratives – le nouvel accord prévoit, outre la réduction du nombre des Etats, l’institution des trois administrations de Ruweng, Pibor et Abye NDR. Cependant, des éléments permettant d’espérer des pas en direction de la paix sont bel et bien présents : la déclaration explicite du Président, le retour à Juba, le 16 février, de Riek Machar en personne de son exil à Khartoum, l’unité démontrée par tous les acteurs internationaux impliqués – Union africaine, UE, Autorité intergouvernementale pour le Développement, Etats-Unis – liant les aides au maintien de la paix.
Le pays tire ainsi un énorme soupir de soulagement mais est dans l’attente de nouvelles concernant la formation du gouvernement et donc l’avenir du pays. C’est ce qu’évoque dans le cadre d’un entretien accordé à l’Agence Fides Sœur Elena Balatti, religieuse combonienne se trouvant depuis 20 ans au Soudan du Sud, journaliste et observatrice attentive de la situation. (...)


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