Rome (Agence Fides) – « Je suis le Bon Pasteur. Le Bon Pasteur offre sa vie pour ses brebis » (Jn, 10,11). Ces paroles de Jésus expriment bien la figure du Pasteur qui, pour le Peuple de l’Ancien Testament, était Dieu lui-même, celui qui avait guidé Israël en le conduisant de l’esclavage à la liberté, de l’Egypte à la Terre Promise. Le Fils de Dieu révèlera pleinement cet Amour, en donnant sa vie pour ses brebis, en libérant le nouveau Peuple des croyants de l’esclavage du péché et de la mort, en leur offrant le don de la Vie Divine. Nous tous, qui appartenons au Peuple de Dieu par le Baptême, nous avons été sauvés par le Sang du Christ. Jésus porte à chacun de nous sur ses épaules, et, dirais-je, qu’il porte avec plus de tendresse encore, les brebis qu’Il s’est choisies pour les faire devenir, à son image, les guides humbles et autorisés de Son Peuple.
L’image du Christ « Bon Pasteur », nous révèle les traits essentiels de la nature du Sacrement de l’Ordre. Que veut dire être Pasteur, recevoir de l’Eglise le ministère ordonné ? Cela veut dire donner sa vie pour le troupeau qui lui est confié : le servir humblement en annonçant et en enseignant la Parole de Dieu, en célébrant les Sacrements du Christ, en allant chercher les brebis perdues et en les conduisant avec bonté au troupeau du Seigneur. Cette charité Pastorale, don spirituel que les Pasteurs ont reçu lors de l’ordination, « ne les prépare pas pour une mission limitée et restreinte, mais pour une mission universelle et très vaste de salut jusqu’aux extrémités de la terre, étant donné que tout ministère sacerdotal participe à la même ampleur universelle de la mission confiée par le Christ à ses Apôtres » (Presbyterorum Ordinis, 10)
Le danger d’utiliser le ministère de l’Ordre pour la réalisation de soi-même est grand. Le danger de mener un style de vie ministérielle séparée de la pulsation concrète de la communauté chrétienne, est une grave menace pour le développement harmonique et pour la croissance de l’Eglise. Mais aussi la tentation de réduire les horizons de sa propre mission à un milieu restreint et limité. L’Apôtre Pierre invitait déjà les prêtres à être intégralement au service de la communauté chrétienne : « Les anciens qui sont parmi vous, je les exhorte… Paissez le troupeau de Dieu qui vous est confié, veillant sur lui, non par contrainte, mais de bon gré, selon Dieu ; non pour un gain sordide, mais avec l’élan du cœur ; non pas en faisant les seigneurs à l’égard de ceux qui vous sont échus en partage, mais en devenant les modèles du troupeau » (1 Pet 5, 1-3).
Aujourd’hui plus que jamais, les hommes et les femmes de notre monde cherchent chez les Pasteurs non des personnes « retirées », mais des hommes « riches de sagesse et de sainteté », qui ont abandonné les biens et les sécurités humaines pour vivre dans une disponibilité totale l’Annonce de l’Evangile. La sagesse est ce don que le Roi Salomon demanda à Dieu pour pouvoir gouverner son peuple : « Parce que tu ne m’as demandé pour toi ni une longue vie, ni la richesse, ni la mort de tes ennemis, mais as demandé pour toi le discernement pour écouter les causes, je fais comme tu l’as demandé. Je t’accorde un cœur sage et intelligent. (1 R 3, 11-12)
Chez le Pasteur, on cherche un homme qui sache écouter, un guide qui aide à comprendre sa propre vie pour pouvoir l’orienter vers des sentiers justes ; chez Lui on cherche la sainteté, c’est-à-dire qu’il soit effectivement uni au Christ par la méditation et par l’annonce de la Parole de Dieu, par la célébration des Sacrements – et tout particulièrement de l’Eucharistie-, et par un témoignage d’amour et d’unité qui soit, surtout, expression du lien qui l’unit à l’Eglise, le Corps du Christ. La sainteté des Pasteurs est ainsi étroitement reliée à la diffusion du message de salut : vivre intensément l’amour que le Christ Pasteur a pour tous les hommes et pour toutes les femmes du monde, élargit l’horizon de son propre service pastoral, fait naître le zèle pour apporter la joie de la foi à ceux qui ne l’ont pas reçue, pousse à aller au devant de ceux qui sont loin du Christ « Voie, Vérité et Vie ».
Les premiers Pasteurs, les Apôtres, ont reçu du Seigneur une tâche très importante : « Allez donc et enseignez toutes les nations, en les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et en leur enseignant à observer tout ce que je vous ai commandé » (Math 28, 19-20)
Au début de ce Troisième Millénaire, le Saint-Père appelle de nouveau l’Eglise à aller au large pour la Nouvelle Evangélisation, et il indique à toute l’Eglise, et de manière particulière aux Pasteurs, des signes d’espérance pour la Mission : « L’Evangile continue à porter ses fruits dans les communautés paroissiales, chez les personnes consacrées, dans les associations de laïcs, dans les groupes de prière et d’apostolat, dans différentes communautés de jeunes, mais aussi par la présence et le diffusion des nouveaux mouvements et réalités ecclésiaux. En chacun d’eux, en effet, le même Esprit sait susciter un dévouement nouveau à l’Evangile, une disponibilité généreuse au service, une vie chrétienne marquée par le radicalisme évangélique et par l’élan missionnaire » (Ecclesia in Europa, 15). Les Pasteurs sont ainsi appelés en tout premier lieu, à accueillir et à encourager ce « dévouement nouveau à l’Evangile », suscité par l’Esprit, pour donner une réponse aux problèmes et aux besoins d’aujourd’hui.
Les Evêques, appelés par leur ministère au service de l’Eglise Universelle, et liés par le Sacrement de l’Ordre au presbyterium dans son ensemble et à chaque prêtre en particulier, ont la grave responsabilité de « réveiller » et d’animer la vocation missionnaire des prêtres, inhérente sacramentellement à chacun d’eux. C’est ce que nous rappelait le Décret « Ad Gentes » : « Puisque de jour en jour augmente le besoin d’ouvriers dans la vigne du Seigneur, et que des prêtres diocésains désirent avoir eux aussi un rôle toujours plus grand dans l’évangélisation du monde, le saint Concile souhaite vivement que les Evêques, réfléchissant à la très gave pénurie de prêtres, qui empêche l’évangélisation de nombreuses régions, envoient à des diocèses manquant de clergé, quelques-uns de leurs meilleurs prêtres, qui se proposent pour l’œuvre missionnaire » (n.38).
En ce Mois Missionnaire, demandons au Seigneur, par l’intercession des nouveaux Saints Daniel Comboni, le Père Arnold Janssen, et le Père Freinademetz – exemple de dévouement total à la Mission de l’Eglise, qu’il ne permette pas que viennent à manquer de nombreux Pasteurs riches en sagesse et en sainteté, prêts à répandre la lumière de l’Evangile jusqu’aux extrémités de la terre. + Cardinal Crescenzio Sepe.
(Agence Fides, 22 septembre 2003, 79 lignes, 1.112 mots)