AFRIQUE - La déprédation de l’Afrique occidentale : un crime qui vient de loin

lundi, 23 octobre 2006

Rome (Agence Fides)- Diamants, êtres humains, bois, armes et drogues. Ce sont les principaux « biens » traités par la criminalité organisée en Afrique occidentale. Un drame dont le monde occidental commence à se rendre compte avec le débarquement sur ses côtes d’immigrés clandestins provenants d’Afrique subsaharienne. Un phénomène qui a une dimension criminelle précise, parce que ce sont des organisations de délinquants travaillant en Afrique occidentale qui commencent ce commerce, lequel se poursuit dans les pays de transit d’Afrique septentrionnale puis en Europe.
Il faut donc porter son regard sur la présence de la criminalité organisée en Afrique occidentale pour comprendre le phénomène. L’analyse que nous présentons veut être un motif de réflexion et une invitation à agir : elle ne doit pas devenir un alibi pour le découragement et la résignation !
Historiquement la région qui va du Sénégal au Nigéria a été le théâtre des incurstions criminelles de pillards et aventuriers de tout genre. « Commerçants » berbères, maliens et européens depuis des siècles se sont rendus sur les côtes d’Afrique occidentale pour se procurer de l’or, de l’ivoire, et des esclaves. Selon les estimations des historiens, pendant 3 siècles environ, au moins 13 millions d’habitants de cette partie de l’Afrique furent contraints de s’embarquer de force vers les Amériques. La création des empires coloniaux de Grande Bretagne, France, Portugal, et Espagne, rendit systématique la spoliation de ces terres.
Après l’indépendance, dans les années 60 du siècle dernier, plusieurs pays de la région furent la proie d’événements dramatiques : coups d’Etat (Togo, Bénin, Burkina Faso, Nigeria, Sierra Leone, Liberia, Ghana, Guinée-Bissau, Guinée, Guinée Equatoriale, Niger et Mali) et guerres civiles (la très sanglante guerre du Biafra, au Nigéria, qui a durée de 1967 à 1970). Les fragiles états indépendants étaient en outre dépendants des exportations de ressources naturelles et de l’agriculture. Le secteur manufacturier était faible ou inexistant. L’explosion de la dette dans les années 80 n’a rien fait d’autre qu’accentuer la dépendance économique de l’étranger et d’exaspérer le problème de la corruption. Les gouvernements locaux se sont alliés avec les groupes minoritaires (plusieurs d’origine moyen-orientale ou asiatique) qui travaillent dans leurs pays ou avec plusieurs sociétés multinationales pour continuer les commerces illégaux de diamants, d’or et d’autres ressources naturelles qui avaient été entrepris à la fin de la période coloniale. Au lieu de protection politique ces groupes ont rendu possible l’enrichissement et la manipulation de dirigeants et de fonctionnaires d’état.
La nationalisation des ressources naturelles réalisée par quelques états, l’imposition de tarifs douaniers, et le contrôle du marché des marchandises de consommation par les gouvernements, ont contribué d’autre part à alimenter la contrebande d’un pays à l’autre avec la création d’un vaste réseau d’intérêts criminels qui s’est perpétué pendant ces décennies.
L’explosion des guerres civiles au Libéria et en Sierra Leone, dans les années 90 du siècle dernier, a encouragé les opérations de contrebande d’armes à la place des diamants (de la Sierra Leone à travers le Liberia) et de bois (Liberia). Certains trafiquants d’armes d’origine soviétique s’étaient installés dans la région, d’où ils alimentaient de vastes commerces d’armements qui allaient bien au-delà de l’Afrique, avec la probable implication d’intérêts très vastes et consolidés.
L’économie de la région est donc informelle et progressivement dominée par des réseaux criminels. La criminalisation de l’économie locale est l’un des principaux obstacles au développement de la zone. Un entrepreneur honnête en effet se retrouve à travailler dans une ambiance où l’inflation est haute mais en même temps où il y a les concurrents du secteurs informel en mesure d’offrir des prix inférieurs. Selon les statistiques de la Communauté Economique des Etats d’Afrique Occidentale (CEDEAO/ECOWS), l’économie informelle concerne 65% de la population et contribue à 60% au Produit Intérieur Brut de la région. (1-continua) (L.M.) (Agence Fides 23/10/2006; lignes 47 mots 605)


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