ASIE/IRAQ - Prise de position du Patriarche de Babylone des Chaldéens contre le projet de création d'une province chrétienne dans la plaine de Ninive

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Bagdad (Agence Fides) – La résolution des problèmes affrontés par les chrétiens en Irak ne passe pas au travers de la création d'une enclave chrétienne ayant sa base dans la plaine de Ninive qui finirait par devenir un bouc émissaire dans les luttes entre les factions sectaires. C'est ce qu'a réaffirmé S.Em. le Cardinal Louis Raphaël I° Sako, Patriarche de Babylone des Chaldéens, dans un long entretien accordé à la chaîne de télévision Rudaw TV, du groupe éditorial basé dans la région autonome du Kurdistan irakien. Les chrétiens – a expliqué le Patriarche – représentent au sein de la société irakienne une composante « sans milices », sans organisation tribale de protection et, en ce temps où le pays est continuellement lacéré par des tensions et des conflits, « il n'est pas sage de demander pour nous l'autonomie au sein d'une province. De cette manière, nous deviendrions le bouc émissaire entre les parties en conflit. Il est maintenant préférable pour nous de vivre avec nos voisins. Nous demandons à tous de respecter nos droits, de ne pas tenter de modifier les équilibres dans les régions où nous vivons. Cependant, si nous essayions de demander une province ou une zone à statut spécial pour les chrétiens, nous finirions par payer un prix plus élevé ».
Le Cardinal a à plusieurs reprises exprimé ses réserves face aux hypothèses d'institution dans la plaine de Ninive d'une zone protégée pour les chrétiens (voir Fides 30/08/2020).
La province de Ninive, historiquement disséminée de villes et villages à majorité chrétienne, est depuis longtemps au centre de projets idéaux visant à créer une zone indépendante d'un point de vue politique et administratif, projets fortement appuyés par des groupes organisés de certaines communautés de la diaspora chaldéenne et assyrienne. Une telle perspective avait été en quelque manière relancée également lors de la Convention nationale promue à Washington en septembre 2016 par l'organisation sans but lucratif américaine In Defense of Christians (IDC).
Dans le cadre du récent entretien accordé à Rudaw TV, le Cardinal a réaffirmé qu'une grande partie des chrétiens ayant fui la plaine de Ninive en 2014 pour échapper à l'avancée des milices du prétendu « Etat islamique » ne reviennent pas sur leurs terres d'origine parce qu'ils ont « perdu confiance en leurs voisins » lesquels, dans de nombreuses situations locales, se sont emparés de leurs biens et de leurs maisons, « Le prétendu « Etat islamique » n'a pas été le seul à incendier les maisons. D'autres mains ont aussi allumé le feu et dans la zone, existent des milices de diverses matrices qui imposent des péages, font régner la peur et menacent les propriétés des personnes d'une manière ou d'une autre ». Le Patriarche de Babylone des Chaldéens a également fait référence aux processus qui, justement dans la plaine de Ninive, zone d'installation traditionnelle des chrétiens autochtones, altèrent actuellement les précédents équilibres démographiques, en alimentant peur et incertitude parmi la population. Il a également réaffirmé que la condition de violence et de conflictualité permanente qui caractérise l'Irak depuis 2003 – année des campagnes de la coalition internationale sous conduite américaine ayant mis fin au régime de Saddam Hussein – pourra être surmontée seulement lorsque seront archivés les systèmes de gestion et de répartition du pouvoir sur base ethnique et religieuse pour faire place à un « Etat civil moderne » basé sur le principe de la citoyenneté, en mesure de garantir l'égalité des droits et des devoirs de tous les citoyens quelque soit leur appartenance ethnique ou religieuse.
Dans ce même entretien, le Cardinal s'est également attardé sur l'annonce du voyage du Pape François en Irak prévu du 5 au 8 mars prochain. « Le Pape est une personne de paix et je ne pense pas que des attaques auront lieu contre lui. Le gouvernement travaille actuellement à la protection du voyage » a affirmé le Patriarche, qui a également évoqué des détails du programme, confirmant le moment de partage spirituel avec des lectures de la Bible et du coran qui verra juifs, chrétiens et musulmans réunis au nom d'Abraham, père de tous les croyants, l'envoi de messages de paix « en direction du Liban, du Yémen, de l'Iran et de la Libye ». Outre les étapes annoncées à Erbil, Mossoul et Qaraqosh, le Cardinal a également exprimé l'espoir que le Pape pourra également se rendre à Najaf, ville sainte de l'islam chiite où réside notamment l’Ayatollah Ali al Sistani. (GV) (Agence Fides 28/12/2020)


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