AFRIQUE/ZIMBABWE - La militarisation des médecins, un risque pour leur maintien sur le territoire national selon l'Evêque de Chinhoyi

lundi, 5 octobre 2020 evêques   corona virus   santé   violence  

Harare (Agence Fides) – « Ils portent au bain de sang, ils tuent. Au lieu de la liberté, ils portent la prison. Ils portent la violence et emprisonnent tous ceux qui s'opposent à eux. La seule chose qu'ils connaissent est la violence ». Telle est la dure attaque portée par S.Exc. Mgr Raymond Tapiwa Mupandasekwa, Evêque de Chinhoyi, à l'égard du gouvernement du Zimbabwe, fortement critiqué dans le pays suite à la répression violente des manifestations et pour la gestion de la crise du Covid-19.
L'Evêque a en particulier condamné le gouvernement du Président Emmerson Mnangagwa à propos des arrestations effectuées en juillet et pour la négation prolongée de la liberté sous caution aux activistes politiques et aux journalistes accusés d'avoir comploté en vue de la chute inconstitutionnelle du gouvernement.
Mgr Mupandasekwa a par ailleurs critiqué le récent décret du Vice-président Chiwenga visant à enrôler les nouveaux diplômés en médecine dans les rangs de l'armée. Le Vice-président et nouveau Ministre de la Santé, Constantino Chiwenga, un officier général (2S) de l'armée de terre, a décrété que les nouveaux médecins doivent être recrutés en tant que médecins militaires, sans quoi ils ne pourront travailler dans les hôpitaux publics.
Quelques 230 étudiants en médecine ont réussi leurs examens de fin d'études et devaient être envoyés dans les hôpitaux publics en tant qu'internes (Junior Resident Medical Officers (JRMO)) pour trois années de formation avant de pouvoir ouvrir des cabinets. Il s'agit d'une mesure qui vise, selon les syndicats, à empêcher les grèves du personnel médical à un moment extrêmement critique pour la santé publique et pour le gouvernement, accusé de ne pas avoir su gérer l'urgence liée à la pandémie.
Mgr Mupandasekwa a déclaré en outre que le gouvernement provoque « une grande angoisse » aux médecins au travers de cette « proposition anticonstitutionnelle. Le parti de la liberté a refusé d'accorder la liberté de choix aux jeunes médecins » affirme-t-il, ajoutant que le pays pourrait bientôt se retrouver privé de médecins suite à ce décret. Les hôpitaux publics luttent actuellement contre la pénurie de médicaments et s'en remettent au soutien de donateurs, en majorité occidentaux. Les hauts fonctionnaires, y compris le Vice-président, cherchent souvent une assistance médicale à l'étranger.
Les 2.000 jeunes médecins du Zimbabwe ont fait grève par deux fois au cours des 12 derniers mois, dénonçant leurs salaires (allant jusqu'à 9.450 Z $ par mois soit 115 USD). Nombre d'entre eux sont prêts à partir après avoir trouvé des postes mieux rétribués dans la région et à l'étranger.
La dure intervention de l'Evêque de Chinhoyi fait suite à la publication, en date du 14 août, de la Lettre pastorale « La marche n'est pas finie » de la Conférence épiscopale du Zimbabwe (voir Fides 17/08/2020). Dans ce document, les Evêques appelaient le gouvernement à prendre ses responsabilités face à la dramatique crise économique et sanitaire aggravée par le corona virus et critiquaient la répression brutale des manifestations de contestation. (L.M.) (Agence Fides 05/10/2020)


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