AFRIQUE/REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE - Prise de position de l’Evêque de Bangassou à propos de l’arrivée massive de Peuls accompagnés d’importants troupeaux de bovins dans le sud-est

jeudi, 23 mai 2019 groupes armés   changements climatiques  

Bangui (Agence Fides) – « Les seigneurs de la guerre locaux facilitent actuellement la progression des bergers peuls dans notre zone, créant l’alarme parmi la population » indique à l’Agence Fides l’Evêque de Bangassou, S.Exc. Mgr Juan José Aguirre Muños,
« Dans l’ensemble du Sahel, le déplacement des Peuls (ou Fulanis) avec des millions de bovins déstabilise actuellement des zones entières du Nigeria, du Niger, du Burkina Faso, du Cameroun, du Tchad et maintenant de République centrafricaine, suite aux conflits qu’ils suscitent entre cette population de bergers nomades et les populations locales d’agriculteurs sédentaires » explique Mgr Aguirre.
« La cause de ce mouvement est la désertification qui contraint les Peuls à aller à la recherche continuelle de nouveaux pâturages et de sources d’eau. Malheureusement, les Peuls, qui sont bien armés, laissent sur leur passage une trainée de sang qui s’allonge de jour en jour » indique l’Evêque. « En Centrafrique, des milliers d’entre eux sont déjà arrivés. Ils ont créé un couloir qui descend du Tchad et arrive en Centrafrique dans la zone de N'Délé, au nord du pays. De là, ils descendent vers Bangassou, dans le sud-est, en traversant les missions de Zémio, Boqui et Obo. Il s’agit de milliers d’hommes, de femmes et d’enfants avec leurs troupeaux qui se dirigent actuellement dans notre zone ».
Mgr Aguirre ne cache pas sa préoccupation car « si les flux devaient se perpétuer à ce rythme, d’ici quelques années seulement, au sud-est de la Centrafrique pourraient vivre jusqu’à 2 millions de Peuls. Les populations locales sont alarmées pour leur avenir. Ce qui est certain est que tout est fait pour ouvrir des couloirs au travers desquels passent les Peuls à la recherche d’eau et de pâtures. Les seigneurs de la guerre ont avancé leurs requêtes visant à transformer une partie de la zone de la mission d’Obo en parc naturel de manière à chasser les agriculteurs et à permettre l’installation des Peuls avec des millions de têtes de cheptel ». « Cela fait partie de la guerre que nous connaissons actuellement en Centrafrique » ajoute-t-il. « Un des seigneurs de la guerre lié aux Peuls est Ali Darassa, un peul (fulani) nigérian. Il s’agit du principal organisateur de ces couloirs ».
« Nous comprenons le drame des Peuls, victimes de la désertification, mais personne n’a demandé la permission des populations centrafricaines qui vivent déjà dans des conditions très dures. En outre, les Peuls sont musulmans et les populations locales sont chrétiennes, ce qui accentue les tensions interreligieuses déjà présentes en Centrafrique » ajoute Mgr Aguirre, qui accueille depuis deux ans dans sa Cathédrale de Bangassou quelques 2.000 musulmans menacés de morts par les bandes locales antibalakas (voir Fides 24/07/2017).
Le mouvement des Peuls risque d’impliquer d’autres pays. « En février – raconte l’Evêque – plusieurs peuls avec leurs troupeaux ont traversé le fleuve Bomu, qui peut être passé à guée à cette époque, s’installant dans la forêt de Garamba, dans le nord de la République démocratique du Congo, où les pâturages sont abondants. L’armée congolaise les a cependant repoussés de force en Centrafrique ». (L.M.) (Agence Fides 23/05/2019)


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