AFRIQUE - Aggravation du phénomène de l’accaparement des terres fertiles de la part d’Etats, de groupes et d’entreprises multinationales

samedi, 28 avril 2018 accaparemment des terrains   economie   finances   biens communs   réfugiés   droits fondamentaux  

MIssio

Rome (Agence Fides) – En ce nouveau millénaire, le phénomène de l’accaparement des terres fertiles est allé croissant au détriment des communautés rurales locales. Il est généralement perpétré par des Etats, des groupes et des entreprises multinationales, des sociétés financières et immobilières elles aussi internationales qui, au cours de ces années, ont acquis ou loué quelques 88 millions d’hectares de terres dans le monde entier mais surtout en Afrique. C’est ce qu’affirme le Rapport intitulé « Les patrons de la terre –l’accaparement des terres fertiles » rédigé par le réseau de coopération international FOCSIV en coopération avec Missio Italie, s’attardant sur une pratique qu’à de nombreuses reprises, les Eglises locales, dans différentes nations, ont dénoncé et contre lequel elles se sont battues en ce qu’il constitue une forme d’exploitation du territoire et génère la corruption.
Une note envoyée à l’Agence Fides indique que la majeure partie des contrats conclus, qu’ils soient transnationaux ou nationaux, concerne des investissements dans le secteur agricole, répartis entre cultures alimentaires et production de biocarburant. Ce type de contrats est suivi par l’exploitation des forêts et par la réalisation de zones industrielles ou touristiques. Parmi les dix premiers pays investisseurs, se trouvent les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas mais aussi des pays émergents tels que la Chine, l’Inde, le Brésil, les Emirats arabes unis, la Malaisie et Singapour. Le phénomène passe au travers de paradis financier et de plateformes financières off-shore. Par exemple, l’île Maurice compte 13 contrats de ce genre concernant 423.000 ha de terrains concentrés surtout au Mozambique et au Zimbabwe. Parmi les dix premiers pays faisant l’objet de ces investissements, se trouvent surtout les pays appauvris d’Afrique, tels que la République démocratique du Congo, le Soudan du Sud, le Mozambique, la République du Congo et le Liberia, alors qu’en Asie, le pays le plus touché est la Papouasie Nouvelle Guinée.
Le Rapport annuel, pensé et rédigé par la FOCSIV, en collaboration avec la Coldiretti (Confédération des cultivateurs directs italienne NDT), enquête sur des sujets qui acquièrent toujours davantage de terrains cultivables, devenant de facto les véritables « patrons de la terre ». Ainsi que le remarque le document, la terre, surtout les terrains fertiles et l’eau salubre, constituent des ressources limitées qui vont vers l’épuisement, sur un marché mondial qui phagocyte tout. Le document affronte le phénomène de l’accaparement des terres fertiles et ses répercussions en termes de conflits, d’expulsions, de migrations, d’appauvrissement de l’environnement et de disparition de la biodiversité.
Le rapport constitue également une dénonciation et une invitation à la réflexion à ce qui se passe en Afrique, à savoir l’application d’un modèle de production et de consommation qui accapare des ressources pour les exploiter sans égard pour les communautés locales, au nom des intérêts de pays riches. Dans ce système économique, la terre est considérée comme une marchandise se trouvant sur un marché privé de règles alors qu’elle constitue en fait une ressource naturelle limitée et indispensable pour la survie et la production de nourriture. Le rapport constitue un long parcours qui part de l’analyse du phénomène de l’accaparement des terres fertiles sur la base de la banque de données Land Matrix pour faire par la suite le point sur les normes internationales en matière de droits fondamentaux et de promotion du droit des paysans à la terre. Le texte se sert d’un terme qui synthétise l’action de l’accaparement des terres fertiles et de certaines opérations lui étant liées : extractivisme, terme utilisé également par le Pape François dans l’Encyclique Laudato si' pour indiquer les actions de gouvernements et multinationales visant à l’extraction de ressources stratégiques pour le marché international : le pétrole et les hydrocarbures, des espèces végétales et animales, de nouveaux minerais essentiels pour la production de technologies mais également de biens essentiels et universels tels que la terre et l’eau.
Analyser le phénomène de l’accaparement des terres fertiles est complexe en ce qu’il intervient en grande partie de manière cachée, opaque, par le biais de collusions entre gouvernements locaux et entreprises, au travers d’investissements provenant de fonds financiers se trouvant dans des paradis fiscaux ou au travers de réseaux compliqués de groupes d’entreprises. (Agence Fides 28/04/2018)


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