VATICAN - De l’huile sur les plaies : une réponse aux drames du divorce et de l’avortement (1)

mardi, 8 avril 2008

Rome (Agence Fides) - Deux plaies actuelles, propres à notre société, dont l’impact numérique croît et devient de plus en plus considérable, en laissant, souvent, ceux qui en sont victimes, seuls et privés de tout espérance. Le divorce et l’avortement sont deux grandes plaies de notre temps tout tourné vers la culture de l’émancipation et de la liberté de choix, culture qui est souvent née seulement de motifs émotionnels. Deux plaies, deux traumatismes différents, qui apportent de grandes souffrances chez ceux qui les vivent, et chez les personnes proches de ceux qui subissent un événement aussi dévastateur.
Suite à l’invitation du Pape Benoît XVI, destinée à une action pastorale et humaine, marquée par l’écoute et par la participation aux problèmes des autres, en suivant l’exemple évangélique du « Bon Samaritain », l’Institut Jean Paul II pour les Etudes sur le Mariage et la Famille, en collaboration avec les Chevaliers de Colomb, a organisé, les 4 et 5 avril derniers, un Congrès intitulé « l’huile sur les plaies : une réponse aux drames du divorce et de l’avortement ». Ce Congrès a été enrichi par les interventions des plus grands spécialistes d’Universités internationales importantes, et aussi par dialogue dense entre les conférenciers et les participants sur les questions les plus épineuses. C’est un travail scientifique qui a présenté, avant tout, les causes et les conséquences des deux plaies, le divorce et l’avortement, en en analysant les aspects sociaux, psychologiques et moraux, pour présenter ensuite et suggérer des solutions, des réponses pastorales

Le divorce : aspects sociaux

Le divorce, dans sa nature d’événement imprévisible, est toujours bouleversant pour ceux qui le vivent, et il comporte non seulement de grandes souffrances, mais aussi la nécessité de renégocier les frontières affectives, et de revoir l’organisation du noyau familial dans son entier. Les effets de la séparation sur les adolescents et sur les jeunes adultes, thème de l’exposé de Madame le Docteur Raffaella Iafrate, du Centre d’Etudes et de Recherches sur la Famille, de Milan, ne peuvent être négligés en aucun cas. Il en résulte que, les plus touchés parmi les enfants, ce sont les filles, qui peuvent en arriver à présenter des signes d’anxiété et de dépression, même pathologiques. Le divorce comporte des aspects qui touchent les enfants des personnes séparées ou divorcées : après le divorce, le rapport avec le parent tuteur - dans la plus grande partie des cas, c’est la mère - n’est plus hiérarchique, mais horizontal : l’enfant devient le support pour le parent resté seul, en prenant souvent sur lui des responsabilités trop grandes pour son âge, et surtout trop coûteuses au moment où il doit faire face à la crise du divorce.
On parle de « parentification de l’enfant », processus par lequel, dans le rapport entre parent et enfant, les rôles sont inversés. Un autre nœud crucial dans la séparation, est la fuite du père : d’après une recherche de l’Université Catholique, 80% environ des enfants de parents séparés, déclarent qu’ils ont peu d’accès auprès de leur père, lorsque les rencontres sont brèves, et souvent marquées par un caractère formel et un certain détachement (comme les lieux publics où ils se font, en contraste avec la chaleur de la maison).
Pour les filles, cela comporte surtout une préoccupation pour la mère, elles voient dans le manque du père, la solitude de la mère, l’absence d’un partenaire à ses côtés. Pour les garçons, le père représente le guide, c’est celui qui dicte les règles et donne les conseils : on peut comprendre combien peut peser le manque de cette figure chez les adolescents et chez les jeunes adultes.
Les problèmes liés au divorce ne sont pas seulement ceux qui apparaissent aussitôt après l’événement ; les recherches récentes montrent l’existence d’effets graves à long terme, qu’il ne faut pas sous-estimer, et qui peuvent se résumer dans la facilité pour les enfants de divorcés d’avoir des rapports sentimentaux ou sexuels occasionnels, en croyant peu au lien du mariage, dans la crainte de répéter les erreurs des parents, et, en même temps, de vouloir les racheter. Il y a un espoir : on peut donner un sens à la souffrance, en cherchant surtout à sauver les liens familiaux, et assurer aux enfants une continuité du lien avec les deux parents et avec les deux familles de leurs parents.
Le divorce a des effets non seulement sur la vie pratique, mais aussi sur la vie spirituelle des ‘enfants du divorce’. Les Eglises, aux Etats-Unis surtout, comme l’a déclaré dans son rapport Madame le Docteur Elisabeth Marquardt, du « Centre Mariage et Familles » de new York, éprouvent des difficultés à ouvrir les portes aux enfants du divorce, elles doivent encore apprendre à songer à leurs besoins. Les enfants des divorcés sont des personnes qui se déplacent souvent d’un parent à l’autre, et donc d’un monde à l’autre, différents entre eux. Un grand mensonge, pour ce qui concerne le divorce, c’est celui du divorce à l’amiable, et, dans tous ces cas, les parents se séparent sans qu’il y ait d’épisodes de violences ou de disputes. En réalité, les conséquences se montent aussi nocives pour les enfants : avant tout, les enfants tendent à penser que, si les choses entre le Papa et la Maman, au fond, vont bien - les parents, évidemment ne sont pas en opposition évidente entre eux - la cause de la séparation les concerne eux aussi, quelque chose qu’ils auraient fait, une de leurs caractéristiques personnelles. Le bon divorce n’existe pas, surtout quand un des parents rencontre une nouveau partenaire qui, avec des modalités différentes, cherche à s’insérer dans un rôle qui n’est pas le sien. Même s’il est réalisé sans conflit, le divorce crée toujours deux pôles opposés, la Maman et le Papa, que l’enfant ressent comme différents l’un par rapport à l’autre. Le conflit n’est pas évident entre les parents, mais il se déroule dans la vie intérieure de l’enfant, contraint à être un « moi » différent selon le parent avec lequel il se trouve, et à sentir toujours, de toute façon, qu’il n’est pas à sa place. C’est là un grand problème, pour les jeunes et pour les Eglises : comprendre la souffrance née du divorce. Les jeunes enfants de divorcés sont moins religieux que les jeunes de leur âge qui vivent dans des situations familiales normales ; 2/3 environ d’entre eux déclarent qu’ils n’ont trouvé aucun prêtre ou membre d’une communauté, qui les ait aidés dans cette situation particulière. Une partie des enfants du divorce devient, en revanche, très religieuse, en remplaçant par Dieu le parent qu’ils ont perdu. Aux Etats-Unis, la foi évangélique semble avoir plus de chance, parce qu’elle repose sur la lecture d’histoires de souffrance et de séparation - comme la parabole de l’enfant prodigue - où les enfants des divorcés se sentent aimés et compris. C’est un signe d’espérance, pour que la vie spirituelle ne soit pas perdue dans le drame du divorce.


Le divorce, aspects psychologiques

Comment vont les enfants des divorcés? C’est une des questions les plus marquantes de la recherche sur les sciences sociales qui, dans les trois dernières décennies, a découvert plusieurs facteurs liés à une augmentation de risque pour les enfants victimes d’un divorce. Madame le docteur Joan B. Kelly, du Centre de Médiation de Californie du Nord, une des spécialistes qui connaît le mieux ces questions, a présenté l’impact de la séparation et du divorce sur les enfants, en en mettant l’accent sur la recherche et sur l’attention à porter au besoin de ces enfants, médicament pour lequel, une souffrance destinée à durer toute la vie, peut diminuer et être acceptée
Un des risques provient de la tension nerveuse que provoque le divorce : 23% environ des parents ne font pas savoir à leurs enfants leur décision de divorcer, ou ils le font par une phrase lapidaire : « Papa/Maman s’en va ». Cela se produit dans 45% des cas. La souffrance procurée par le divorce est une véritable et propre souffrance, qui, bien souvent, ne se voit pas, parce qu’on n’interroge pas les enfants sur les expériences intérieures ; mais elle existe et elle se développe de manière cachée. Un autre risque naît de la perte de rapports importants : plus de 25% des enfants déclarent qu’ils n’ont pas vu le parent auquel ils n’ont pas été confiés, dans les 2 ou 3 ans qui ont suivi le divorce. En eux, se fait jour le sentiment de la perte, de la nostalgie, et ils en arrivent à se demander si ce parent les a vraiment aimés, et souvent, ils ont des attitudes de colère vis-à-vis du parent auquel ils ont été confiés, coupable de ne pas aider à maintenir les rapports avec l’autre parent. L’état conflictuel entre les époux est une autre difficulté à laquelle sont soumis les enfants : le conflit commence (et crée de graves dégâts) avant le divorce, et, dans environ 15% des cas, il se poursuit pendant 2 ou 3 ans après la rupture définitive. Nombreux sont les risques psychologiques et de comportement des enfants de divorcés : ils ont peu d’estime d’eux-mêmes, des problèmes pour se réaliser, ils abandonnent les études en nombre plus grand que les jeunes de leur âge, en compromettant ainsi leur vie professionnelle, et leurs futures ressources économiques. Après ses collègues, Madame le docteur Kelly, présente aussi des signes d’espérance : il existe des facteurs qui réduisent les risques de difficultés d’adaptation pour les enfants de divorcés et séparés, plusieurs éléments de protection encore peu connus, mais efficaces, comme l’aide apportée pour aborder le divorce dans les phases finales, l’attention des parents à localiser et à diminuer les conflits, les contacts suffisants avec le parent auquel les enfants ne sont pas confiés. L’espérance de risques moindres, vient du fait qu’il est possible de comprendre que les enfants et les parents, dans le divorce, ont des exigences très différentes.


Le divorce, aspects moraux

Le divorce n’est pas la fin de tout, car les parents sont appelés à exercer encore leur fonction éducative, ils doivent accompagner leurs enfants pour les aider à devenir grands et à se construire un avenir rempli d’espérance et de beauté. Les parents parfaits n’existent pas, mais il existe des principes éthiques que, même s’ils sont séparés ou divorcés, ils doivent maintenir pour leurs propres enfants. Le Père Olivier Bonnewijn, de l’Institut d’Etudes Théologiques de Bruxelles, a cité “Amour et Responsabilité” du Pape Jean Paul II : « Les parents doivent vouloir la nouvelle créature comme la veut le Créateur, c’est-à-dire pour elle-même ». Après le divorce, tous les deux doivent être sensibles et attentifs à veiller à ce que leurs enfants ne manquent pas de leur propre disponibilité, ils doivent leur dire la vérité, les éduquer à la liberté, les aider à étouffer l’auto-accusation par laquelle ils cherchent à répondre à la séparation de leurs parents, leur donner une juste place, ne pas détruire l’image de l’autre conjoint, et maintenir une cohérence éducative qui les aide à sortir, fortifiés et, autant que possible, sereins, du drame de la séparation.


Le divorce: quelles réponses??

L’Eglise assume le rôle de famille dans la foi; pour cela, elle est la réalité la plus apte pour atteindre, par la charité, la compagnie et l’éducation, les enfants du divorce. Dans l’Eglise et dans la société civile, il existe de nombreux parcours possibles, dont beaucoup donnent des fruits excellents, comme les « groupes de parole », pour les enfants de 6 à 12 ans ; par l’utilisation de paradigmes symboliques, les familles divisées peuvent retrouver la valeur des liens, et les jeunes, enfants de parents séparés, peuvent partager avec d’autres enfants, l’expérience de grande souffrance qui provient du divorce. (1 - à suivre). (P.C.) (Agence Fides, 8 avril 2008)


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